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Partir un an : les aventures dessinéssinées de Chérie et Chéri
Georges Brassens, Hors album
Le petit-fils d'Oedipe
Oedipe
Grâce à Freud, tout le monde aujourd'hui sait qu'Oedipe connut tout un tas de malheurs pour avoir couché avec sa mère, enfreignant ainsi le tabou qui serait à la base de nos civilisations.
Cette chanson semble bien être un remake, plus fin et mieux tourné, d'une vieille chanson paillarde qui commençait ainsi:
On m'a donné cent sous - Pour acheter des bretelles (bis)
Mais je les ai gardés pour aller au bordel(le).

Et se terminait par:
Si j'ai baisé ta mère - T'as bien baisé la mienne.

[contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
01Papa m'envoie quérir cent sous de mortadelle.
Cent sous
La pièce de cent sous, c'est ainsi qu'on appelait encore, dans les années 1950, la pièce de cinq francs, cinq francs anciens, bien sûr. Divisée en deux, elle vaut, comme le montre la suite de la chanson, 2F50. Le compte est bon. C'était à l'époque le prix des infects chewing-gums GLOBO. Les "vrais" chewing-gum, à la menthe, valaient déjà 10F.
Il existait aussi une pièce de 20 sous (1F) et 40 sous (2F). Il a même existé, jusqu'à la fin des années 1940 il me semble, une pièce de 10 sous, qui valait donc 50 centimes, et avait un trou au milieu. On gardait celle-là précieusement, car elle servait à des tas de choses, entre autres comme rondelle qu'on plaçait devant l'hélice (en fer blanc) de nos bateaux (souvent des sabots) dont le moteur était un élastique de chambre à air.

[contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
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02Empochant la monnaie, moi je file au bordel(le).
 
03"Où vas-tu mon garçon de cette allur' fougueuse ?"
04Me lance Grand'Maman. — Je vais courir la gueuse.
 
05"— Il est inconvenant de fréquenter les putes.
06Tu m'en donn's la moitié, juste et tu me culbutes.
Questions de morale
Ce distique qui donne la parole à la grand-mère est construit sur un contraste comique : au ton moralisateur ("inconvenant") du premier vers s'oppose la proposition scabreuse du second. D'où l'effet comique.
[contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
 
07"Quoique j'atteigne hélas un âge canonique,
08À bien des jeun's au pieu je fais encor' la nique.
 
09"D'abord ça te permet quelques économies,
10Et puis le patrimoine sort pas de la famille."
 
11J' tends mes deux francs cinquante à cette bonne vieille ;
12Ce fut un' bonn' affaire : ell' baisait à merveille.
 
13Le père, à mon retour, me demande : "Où est-elle ?"
14Le bâfreur attendait son bout de mortadelle.
Bâfreur
Glouton - bâfrer = manger avidement
[contact auteur : Jeje Casseron] - [compléter cette analyse]
 
15En voyant la portion que je mis sur la table,
16L'auteur d' mes jours poussa des cris épouvantables.
 
17Il parlait de botter dans la région fessière
18Cell' qui n'en pouvait mais, la gente saucissière.
 
19Il ouvrit un museau de carpe suffocante,
20Quand il connut l'emploi des aut's deux francs cinquante.
 
21"- T'as baisé ma maman, petit énergumène.
22- T'avais qu'à commencer par pas baiser la mienne."
 
23Mon argumentation vous lui coupa la chique :
24Les Français ne résistent pas à la logique.
 
25Depuis, bibliquement, jusqu'à c' qu'ell' rende l'âme,
26Je connais ma grand'mère et baste à qui me blâme.
Connaître bibliquement
La traduction de la Bible qui a longtemps fait autorité en France était celle de Louis Segond, qui emploie cet euphémisme étrange pour signifier "avoir des rapports sexuels". Il serait intéressant de savoir exactement ce que dit le texte hébreux. Avis aux érudits, cela m'intéresse. Bref, Adam "connut" Ève, et ce fut le début de l'humanité, un début cahoteux d'ailleurs, puisque leur fils aîné, Caïn, tua son cadet Abel dans une crise de jalousie. C'était mal parti, et ça n'est guère allé mieux depuis.
[contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
Complément
Dans sa traduction de la Bible, André Chouraqui utilise le mot "pénétrer" dans ce contexte, et dit qu'effectivement le même mot est utilisé en hébreux pour signifier "connaître". En français, on peut aussi dire qu'on a pénétré un sujet,
lorsqu'on le connaît de fond en comble.

[contact auteur : Gaël Liardon]
 
27Quand la hausse des cours devient extravagante,
28Mémé bloque son prix : toujours deux francs cinquante.
 
29Mais si mon père est pris d'un' fringale de saucisse,
30Il va l'acheter lui-même, excellent exercice !
 
31Du coup j'ai plus d'argent ; de peur que je n'en vole,
32Grand'mèr' m'accorde alors ses faveurs bénévoles.
 
33Pour qu' la moral' soit sauve et qu' la chanson finisse,
34J' bais' grand'mère à l'œil ; le Bon Dieu la bénisse !

Georges Brassens