Bacheliers Le terme est pris dans le sens ancien qu'il a chez Villon ou Rabelais : à peine plus qu' "escholier", moins avancé que nos "étudiants". Sans rapport direct, en tout cas, avec notre moderne baccalauréat. [contact auteur : Dominique Chailley] - [compléter cette analyse]
Sans vergogne Sans vergogne = sans honte
Un lecture attentive du texte montre que ce refrain, qui peut paraître un peu mécanique, est en fait justifié par le contexte ; il a du sens pratiquement partout, sauf peut-être aux vers 22 et 30. Pas mal, quand même, sur 18 couplets de vers aussi courts ! [contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
Sans vergogne Expression archaïque particulièrement appréciée de Brassens puisqu'on la retrouve dans P... de toi (T'as couru sans vergogne, et pour une escalope) et dans Hécatombe (Or, sous tous les cieux sans vergogne).
Dans Hécatombe comme dans cette chanson, elle contibue à donner un aspect intemporel au lexique et à la fable. En ce sens, il faut la rapprocher des autres termes rares du texte, comme "bacheliers" ou "sycophantes". [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Complément "Le bachelier sans vergogne", livre d'Albert Machon (Ferenczi 1939) a influencé brassens, entre autres pour L'Auvergnat. [contact auteur : Bernard Guérin]
La vraie crème Si l'on part du principe que, dans ce premier couplet, "sans vergogne" a un sens réel, peut-on dire que des bacheliers sans vergogne sont la vraie crème des écoliers? La suite nous confirmera que les bacheliers en question ne sont pas vraiment des enfants de choeur. On peut donc supposer que "la vraie crème des écoliers" ce sont des adolescents un peu turbulents, "un peu voleurs", par opposition à une fausse crème des écoliers, celle, consacrée par l'institution scolaire, des premiers de la classe. En cela, Les quatre bacheliers rejoignent largement la Rosa de Brel. [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Le larcin en question Ce vers est l'aveu propre, mais nuancé, du délit ; l'histoire dit que de toute la bande de ces jeunes voleurs qui délestaient leurs familles de leurs joyaux pour les revendre discrètement aux bijouteries, Georges Brassens était le moins impliqué (n'ayant à son actif qu'un seul bijou dérobé) [contact auteur : Sophie R.] - [compléter cette analyse]
Complément D'après Littré "sycophante" est le nom qu'on donnait dans Athènes aux dénonciateurs qui livraient aux passions de la foule les citoyens éminents et surtout ceux dont elle redoutait le plus la raison ou la vertu. Il y avait des gens à Athènes qui ne vivaient que de délations ; on les appelait les sycophantes.
(il n'empêche qu'étymologiquement il y a de la figue là dessous, puisqu'un sycophage, toujours dans Littré est celui qui vit de figues). [contact auteur : Philippe D.]
Complément D'après Alain Rey et son indispensable Dictionnaire Historique de la Langue Française, le sycophante athénien dénonçait effectivement les voleurs de figues mais le mot n'est employé que dans son sens figuré de "délateur", et ce dès 1528. Cela dit, celui qui ne laisse pas courir les voleurs de figue, ça ne vous dit rien ? [contact auteur : Mathieu Rasoli]
Complément A l'origine, dans certains cultes agraires primitifs, les sycophantes étaient chargés de "révéler la figue". Sycophante vient du Grec "sucophantès" : de sukon = figue et de phanein = faire connaître. Sans doute, l'expression cache-t-elle symboliquement un rite d'initiation aux mystères de la fécondité.
Plus tard, on appelait ainsi les voleurs de figues dans les bois sacrés de l'Attique mais aussi, selon Plutarque, ceux qui en exportaient en contrebande. Puis le mot désigna les délateurs de ceux qui exportaient des figues en contrebande ou qui volaient les figues des figuiers sacrés. Par la suite, ce fut le nom que l'on donnait dans Athènes aux dénonciateurs de tout poil... "Celui qui montre la figue" était donc celui qui, par un geste particulier, signalait un malfaiteur à la vindicte populaire.
Aujourd'hui, exit la figue et ses mystères, sycophante est synonyme de dénonciateur, de délateur, et même d'hypocrite. [contact auteur]
Rime bachelier / liées Rime déconseillée par la versification classique entre un mot prononcé en synérèse (une seule syllabe pour deux voyelles : ba - che - lier) et un mot prononcé en diérèse (une syllabe par voyelle : li - ées). Ajoutée à la mélodie lancinante de la chanson, on a l'impression que la rapidité du mot "bachelier", sa vigueur, sa jeunesse, se fige dans la lenteur, l'emprisonnement phonétique des "mains liées" [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Prison Il est peu probable que ces menus larcins conduisent quelques gamins en prison, et d'ailleurs l'anecdote rapporte que les parents sont venus chercher les enfants au commissariat. Pourquoi "prison" plutôt que "commissariat de police" ? Il me semble y avoir deux réponses : d'abord pour des raisons poétiques et prosodiques, la laideur et la longueur du mot "commissariat" n'ayant rien à faire dans cette chanson, et ensuite (et il est possible que Brassens ait réfléchi dans cet ordre) parce que "prison" soulignait l'humiliation ressentie par les jeunes garçons [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Mauvais graçons Les sycophantes prennent la parole : "mauvais garçons" est une mention ironique des détracteurs que le vieux narrateur reprend pour montrer son caractère excessif. [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Anecdote Papa Brassens - aperçu sur une photo - était costaud et de haute stature. On s'attend donc à un châtiment particulièrement redoutable de sa part envers le coupable ! La suite va nous prouver que non... [contact auteur : Carlo P.] - [compléter cette analyse]
Complément Il va sans dire qu'il est "le plus grand" au sens propre, mais également, de par le reste du texte, aussi au sens figuré. Il pardonne à son fils, et le fait qu'il soit miséricordieux démontre une force de caractère, une grandeur, que les autres pères n'ont pas. [contact auteur]
On s'attendait Le clin d'oeil que Carlo P. fait au Gorille n'est pas si absurde : le père est impressionant physiquement et sa victime ne fuit pas. Il n'est pas certain toutefois que celle-ci s'attende à quelque chose de précis, à la différence du juge violé. Le pronom "on" paraît plutôt désigner la foule des sycophantes, spectacteurs, compagnons d'infortune, etc. L'utilisation de "on" mis pour "nous" est en effet assez peu probable, puisque la chanson commence par "nous" et que rien ne semble justifier une dégradation subite et fugitive du niveau de langue.
Pour en revenir au Gorille, signalons que le point commun est bien que "la suite nous prouva que non", c'est-à-dire que les bourgeois (juge, flics) font toujours preuve d'un manque total de sagacité.
On pourra voir aussi à ce propos Les croquants (ça les attriste, les étonne) et surtout Les Philistins de Richepin, qui semble être le texte à partir duquel tout dérive. [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Corde et chance On sait que la corde d'un pendu est censée porter chance. "Il a de la corde de pendu" = il a de la chance. Brassens a plusieurs fois fait allusion à cette superstition, en particulier dans Celui qui a mal tourné. [contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
Complément Le vers "A de la chance quand il a" est donc une sorte de traduction de l'expression imagée et ambivalente "a de la corde de pendu" (chance mais aussi menacé par le châtiment). A ma connaissance, c'est la seule fois que Brassens explicite ainsi une expression ou un terme argotique. [contact auteur : Mathieu Rasoli]
Ce tonneau-là On voit que le lexique chiadé voire archaïque change sensiblement après le pardon du père : "blague à tabac", "a de la corde de pendu", "de ce tonneau-là". C'est vraisemblablement l'indice que la bonté, la simplicité du père entraînent avec elles un lexique de bonté et de simplicité, qui prend la place du lexique recherché recherché et rebelle du jeune homme. [contact auteur : Mathieu Rasoli] - [compléter cette analyse]
Hébreu "c'est de l'hébreux" = "c'est du chinois" = on n'y comprend rien.
Ce qui fait gag ici, c'est que l'Evangile est supposé, justement être de l'hébreu puisque Jésus était Juif. La Bible juive, notre Ancien Testament, est écrite en hébreu.
Au deuxième degré, on est à peu près sûr que Jésus ne prêchait pas en hébreu, mais dans un dialecte sémitique, l'araméen, que Mel Gibson a d'ailleurs utilisé dans sa Passion, où on voit en somme le Christ mourir en V.O.
Au troisième degré, on ne possède en fait aucun texte de l'Evangile ni en hébreu, ni en araméen. Tout le Nouveau Testament, de St Mathieu à l'Apocalypse, nous est parvenu... en grec! Le grec, comme aujourd'hui l'anglais, était la "langue internationale" de la Méditerranée à cette époque. [contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
Complément Sur le fond, ce qu'implique ici Brassens, c'est que le père, en pardonnant, met en pratique le message évangélique (il faut pardonner "soixante-dix-sept fois sept fois" dit quelque part le Christ), alors que les autres, tout bons chrétiens qu'ils se disent, n'y ont rien compris. [contact auteur : Henri T.]