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Partir un an : les aventures dessinéssinées de Chérie et Chéri
Georges Brassens, Hors album
Sur la mort d'une cousine de sept ans
01Hélas, si j'avais su lorsque ma voix qui prêche
02T'ennuyait de leçons, que sur toi rose et fraîche
03L'oiseau noir du malheur planait inaperçu,
04Que la fièvre guettait sa proie et que la porte
05Où tu jouais hier te verrait passer morte…
06Hélas, si j'avais su !…
 
07Enfant, je t'aurais fait l'existence bien douce,
08Sous chacun de tes pas j'aurais mis de la mousse ;
09Tes ris auraient sonné chacun de tes instants ;
10Et j'aurais fait tenir dans ta petite vie
11Des trésors de bonheur immense à faire envie
12Aux heureux de cent ans.
 
13Loin des bancs où pâlit l'enfance prisonnière,
14Nous aurions fait tous deux l'école buissonnière.
15Au milieu des parfums et des champs d'alentour
16J'aurais vidé les nids pour emplir ta corbeille ;
17Et je t'aurais donné plus de fleurs qu'une abeille
18N'en peut voir en un jour.
 
19Puis, quand le vieux janvier les épaules drapées
20D'un long manteau de neige et suivi de poupées,
21De magots, de pantins, minuit sonnant accourt ;
22Parmi tous les cadeaux qui pleuvent pour étrenne,
23Je t'aurais faite asseoir comme une jeune reine
24Au milieu de sa cour.
 
25Mais je ne savais pas et je prêchais encore ;
26Sûr de ton avenir, je le pressais d'éclore,
27Quand tout à coup pleurant un pauvre espoir déçu,
28De ta petite main j'ai vu tomber le livre ;
29Tu cessas à la fois de m'entendre et de vivre…
30Hélas, si j'avais su !
 

Hégésippe Moreau